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Questions dans la Conception de Programmes
Collaborateur: La Banque Mondiale
L'auteur: Decentralization Thematic Team
Le contact: Jennie Litvack



La décentralisation et les services médicaux

L'argument général en faveur de la décentralisation des services médicaux est basé sur les promesses qu'elle offre pour l'amélioration de ces services. Cependant, deux questions se posent auxquelles on n'a pas de réponse précise : 1) comment peut-on améliorer ces services? 2) Quel est l'impact spécifique des différentes réformes du système de services médicaux? Plusieurs caractéristiques des services médicaux (par exemple, la nature controversée de certains services tels que le planning familial, l'importance de la formation formelle du personnel et la nature intégrée des services) rendent la décentralisation du domaine médical plus complexe et potentiellement plus difficile que celle d'autres secteurs. La décentralisation du secteur de la santé étant souvent motivée par la politique, les avantages théoriques attirent l'attention plus que les faits concrets issus d'expériences vécues dans d'autres pays, lesquelles expériences ne nous indiquent pas clairement les bienfaits de la décentralisation. Sans une bonne planification et une prise en compte des leçons tirées par d'autres pays, la décentralisation des services médicaux peut être décevante au mieux et nuisible dans le pire des cas.

Cette note soulève les problèmes à résoudre pour que la décentralisation de services médicaux soit bénéfique.

Qu'est-ce que la décentralisation?

Le terme décentralisation est utilisé pour décrire une grande variété de transfert de pouvoirs et de systèmes de responsabilisation. La décentralisation va du transfert de pouvoirs limités aux niveaux inférieurs de l'administration médicale et des mécanismes de financement, jusqu'à des réformes en profondeur qui font une restructuration complète de la fourniture des services. Dans le premier cas, la décentralisation peut devenir plus tard, la force motrice de la réforme du secteur de la santé; dans le dernier cas, elle est entraînée par la dynamique d'une réforme de plus grande portée du secteur. Les paramètres de la décentralisation - le rythme, les pressions, la portée des questions à examiner - varient considérablement.

Les promesses de la décentralisation

La décentralisation du secteur de la santé est devenue intéressante aux yeux de beaucoup de gens parce qu'elle offre plusieurs avantages théoriques (Mills et al. 1990). Ces avantages potentiels sont:

  • Un service médical plus rationnel, plus unifié et qui satisfait les préférences locales
  • Une meilleure exécution des programmes de santé
  • Une diminution des services inutiles grâce à une définition plus précise des populations ciblées
  • Réduction d'inégalités entre régions rurales et urbaines
  • Maîtrise des coûts en adoptant des programmes rationalisés
  • Davantage de participation (financière...) des communautés locales
  • Une plus grande intégration des activités d'agences publiques et privées
  • Une meilleure coordination intersectorielle, surtout dans les activités de développement d'administration locale et de développement rural.

Réserve

Insuffisance de données sur les bienfaits de la décentralisation

A ce jour, il y a peu de preuves cependant, pour confirmer que ces bienfaits potentiels sont réalisables. Sauf pour quelques-uns d'entre eux, la décentralisation du secteur de la santé est une expérience récente dans les pays en développement, et son impact sur la gestion du secteur et sur les services fournis a rarement été évalué. Par conséquent, le débat sur la question de savoir si la décentralisation améliore effectivement l'équité, l'efficacité, la responsabilisation et la qualité dans le secteur de la santé, continue sans nouveaux éléments d'informations. Bien que des expériences personnelles et des études dans certains pays confirment qu'une décentralisation mal conçue et effectuée hâtivement a de mauvaises conséquences sur la fourniture de services de santé (Gilson et al. 1994, Kolehmainen-Aitken et al. 1997), nous n'avons pas de cadre d'analyse clair pour saisir les facteurs responsables de la réussite ou de l'échec d'un programme de décentralisation (Bossert 1997).

Une première tentative pour définir un cadre

L'expérience montre que la réalisation des avantages de la décentralisation dépend beaucoup de sa conception. En général il faut prêter une très grande attention aux besoins et aux priorités des services médicaux lorsqu'on décide des fonctions et des programmes à transférer ou à garder sous le contrôle de l'administration centrale. Si une fonction est d'un caractère critique à l'accomplissement d'objectifs de l'échelon central et si sa viabilité à l'échelon local ne peut pas être garantie, elle ne doit pas être décentralisée. En tenant compte de cela, le tableau suivant résume la structure générale servant de guide pour répartir les responsabilités aux niveaux central et local tandis que le reste de cette note esquisse une série de questions à examiner.

  1. La liberté qu'ont les administrations locales de s'adapter aux conditions locales doit être contrebalancée par une vision commune concernant les objectifs du secteur de la santé et le but de la décentralisation visant à renforcer ces objectifs. La politique de la décentralisation doit avoir un mécanisme de coordination.

    La intérêts politiques locaux augmentent à mesure que le niveau central cède davantage de responsabilité au niveau local. La décentralisation tout en engendrant plus de sensibilité aux exigences locales, a deux principaux inconvénients : Premièrement, les officiels locaux changent fréquemment et peuvent ne pas avoir une bonne connaissance des politiques nationales clés de la santé. Deuxièmement, il se peut que des groupes locaux s'opposent aux politiques nationales : un gouverneur de province aux Philippines, a interdit un projet de planning familial financé par des dons. Il est certainement convenable et même souhaitable que la décentralisation permette aux administrations locales de concevoir des programmes selon les préférences locales; cependant, les services qui constituent une priorité nationale (le planning familial par exemple) doivent être administrés et financés par le gouvernement central.

  2. Un financement adéquat et une définition claire des mécanismes de transfert de revenus sont d'une importance vitale

    Préoccupés avec les questions générales sur les services médicaux élémentaires ou avec un nouveau modèle de services médicaux décentralisés, les décideurs risquent de négliger les questions cruciales portant sur le financement du système de santé à décentraliser. Un écart considérable entre les revenus disponibles et les chiffres du plan de décentralisation risque de compromettre la capacité du secteur de la santé de fournir des services équitables et de bonne qualité. La Zambie et l'Afrique du Sud sont confrontées à ce problème dans leurs efforts actuels de décentralisation.

    L'expérience nous montre la voie à suivre :

    • L' allocation des revenus doit tenir compte des obligations préexistantes en matière de dépenses locales. En Bolivie et aux Philippines par exemple, les formules de financement fixes utilisées pour allouer le revenu national aux différentes administrations locales ont omis de prendre en considération l'inventaire des installations médicales héritées par ces administrations et les services qu'on attendait d'elles. Les administrations locales qui ont hérité de responsabilités coûteuses comme les hôpitaux n'ont pas souvent été capables de maintenir le niveau de service fourni auparavant.
    • Au niveau local, dans l'allocation des fonds, on doit tenir compte des directives nationales en la matière. La marge de liberté dont dispose le niveau local pour décider du montant des fonds alloués aux services médicaux, les réalités budgétaires locales et les procédures financières, influent considérablement sur le fonctionnement du système de la santé. En Nouvelle Guinée, plusieurs provinces ont manqué de payer la formation d'infirmières qui leur avait été conférée sous la décentralisation. En quatre ans, la capacité de formation de cette importante catégorie de personnel a baissé de treize écoles gouvernementales pour 135 diplômés par an, à trois écoles pour 13 diplômés.
    • Toute politique du niveau central doit prendre en considération les conditions et la capacité locale. Aux Philippines, l'écart qu'il y a entre le coût des allocations au personnel médical prévues par les accords entre les syndicats et le gouvernement central et la capacité de l'administration locale de payer ces allocations a profondément affecté le morale du personnel tandis que les lourdes procédures financières locales ont causé des risques de pénurie de fournitures médicales essentielles. Certaines administrations locales requièrent jusqu'à 40 différentes signatures pour passer une commande.

  3. On devrait tenir compte de la carence en capacité de gestion tant au niveau central qu'au niveau local

    Ignorer la carence en capacité de gestion au niveau central ou local, c'est-à-dire s'occuper insuffisamment ou tardivement de la formation du personnel pour ses nouveaux rôles constitue une omission grave aux conséquences prévisibles sur les services médicaux. La décentralisation crée une nouvelle charge lourde, surtout pour les niveaux inférieurs d'administration. Il manque d'administrateurs de santé qualifiés dans plusieurs pays. En outre la capacité de formation en gestion peut ne pas être grande pour satisfaire les besoins en formation qui croissent très rapidement. Madagascar, par exemple, a commencé à transférer la planification, la gestion et la responsabilité du budget à 111 districts de santé sans avoir un nombre suffisant d'administrateurs de santé qualifiés pour servir tous ces districts.

    La décentralisation change les rôles du personnel du ministère central : ils passent de la gestion quotidienne à l'élaboration de la politique générale, donnent des conseils techniques et font le suivi des programmes. Les administrateurs de l'administration centrale ont besoin d'un recyclage systématique que beaucoup de pays négligent cependant. Dans certains cas, des réductions de personnel au Ministère de la Santé ont été si grandes que le fonctionnement efficace du centre a été remis en question. On indique que c'est le cas en Ethiopie en ce moment. Au Nepal, des réductions initiales au niveau central ont paralysé le Programme élargi d'Immunisation.

    Conclusion

    Bref, la décentralisation lance de grands défis pour la fourniture de services médicaux. La participation active des administrateurs de la santé dans la conception de la décentralisation, des normes nationales d'allocation de ressources et des normes de services médicaux claires, un système de suivi, sont essentiels pour assurer l'équité, la qualité et pour améliorer l'efficacité.