Revenus


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Questions dans la Conception de Programmes

Collaborateur: La Banque Mondiale
L'auteur: Decentralization Thematic Team
Le contact: Jennie Litvack



L'allocation de Revenus

Pour satisfaire leurs besoins en revenus les gouvernements s'appuient sur une grande variée d'instruments fiscaux (impôts directs, indirects, généraux, spécifiques, sur les affaires, sur les personnes...). La question qui se pose ici est de savoir quel type d'impôts est commode pour les différents niveaux d'administration.

Les principes de l'allocation d'impôts

L'affectation d'impôts aux collectivités territoriales dépend partiellement de la combinaison d'impôts utilisée globalement dans un pays donné. Quelle combinaison d'impôts est idéale? Cette question n'a pas été très développée même dans les pays unitaires. Presque universellement, les administrations utilisent des systèmes d'impôts équilibrés. Par exemple, l'assiette de l'impôt sur les ventes et de l'impôt sur les revenus chevauchent considérablement. Du point de vue de l'équité et de l'efficacité, une seule assiette générale devrait suffire et pourtant aucun gouvernement n'utilise une seule assiette pour collecter l'impôt. On justifie généralement cette approche en indiquant qu'avec une combinaison d'impôts, le taux d'imposition demeure faible et que cela réduit les cas d'évasion fiscale et de fraude fiscale. En outre, une combinaison d'impôts serait comme un filet qui assure que les gens paient l'impôt sous une forme ou sous une autre, ce qui rend le système fiscal plus équitable. Quel doit être le coefficient pour chaque impôt dans cette combinaison? La réponse est une question d'opinion et pas quelquechose qu'on pourrait déduire des principes.

Les mêmes considérations générales s'appliquent quand il faut décider comment attribuer les impôts dans un système fédéral. Il doit y avoir un équilibre entre l'équité et l'efficacité d'une part, et les considérations administratives de l'autre et l'attribution précise ne se fera qu'après mure réflexion dans chaque contexte. Nous pouvons néamoins esquisser les principes économiques qu'on prend en considération quand il faut décider quel type d'impôt attribuer aux niveaux inférieurs d'administration. Ces principes sont :

L'efficacité du marché commun intérieur

Le marché commun intérieur fonctionne mieux si toutes les ressources (main-d'oeuvre, capital, biens et services) circulent librement d'une région à d'autres sans entraves ou distorsions imposées par la politique gouvernementale. Les systèmes d'imposition décentralisés réduisent l'efficacité de l'union économique de deux manières : primo, le manque de coordination dans l'administration de l'impôt risque de provoquer des distorsions sur les marchés des ressources (surtout sur le marché du capital et sur celui des biens marchands) qui circulent à travers les frontières. Ces effets négatifs peuvent être amoindris considérablement si les administrations d'Etats fédérés reconnaissent que les ressources doivent circuler. Mais de l'autre côté, en reconnaissant cette réalité, elles pourraient bien se lancer dans la concurrence en mettant en place des programmes sociaux pas nécessairement rentables, pour attirer des ressources vers leurs collectivités. Si toutes les collectivités territoriales appliquaient de telles politiques, il en résulterait des impôts trop faibles et inefficaces (ou des subventions excessives) sur les facteurs mobiles.

L'Equité nationale

Les systèmes de transferts d'impôts est l'un des instruments pour atteindre l'objectif d'équité. Faire de l'équité un objectif fédéral se justifie par le principe que chacun doit avoir les mêmes chances de participer au bien-être social et on suppose que l'administration centrale est seule capable d'assurer l'équité pour tous les citoyens dans différentes régions. Cet objectif peut ne pas être réalisé pleinement si les collectivités territoriales n'ont pas le même goût pour la redistribution et si la prise de décisions au niveau central n'est pas inspirée par des critères normatifs. Dans la mesure ou l'équité demeure un objectif de la politique fédérale, la décentralisation du système fiscal peut gêner sa réalisation. Des politiques disparates des administrations d'Etat peuvent, en plus de inefficacité, donner lieu à une redistribution inégalitaire pour les résidents des différents Etats. Aussi, étant donné la mobilité de la main-d'oeuvre et du capital à travers les frontières d'Etat, les Etats peuvent se livrer à des politiques de redistribution perverses en utilisant les impôts et les transferts pour attirer les personnes à revenus élevés et repousser les personnes à revenus faibles. Des politiques de redistribution -motivées par l'égoïsme des Etats peuvent être compensatoires au niveau des allocations de ressources mais donneraient lieu à moins de redistribution. Bien sûr, ceux qui détestent la redistribution par l'entremise du gouvernement préféront la décentralisation pour les mêmes raisons. Ceci risque d'être problématique plutôt pour les impôts qui entraîne la redistribution ainsi que pour les transferts.

Les coûts administratifs

La décentralisation de la collecte d'impôts peut augmenter les coûts de la perception et de la déclaration pour le secteur public et pour le secteur privé. Il y a des coûts fixes liés à la collecte de tout impôt que les Etats doivent assumer pour chaque type d'impôt qu'ils perçoivent. Les contribuables doivent aussi assumer les coûts liés à la déclaration de leurs impôts. Les possibilités d'évasion fiscale et de fraude fiscale accroissent avec la décentralisation pour certains types d'impôts. Ceci est vrai dans les cas où l'assiette de impôt est mobile ou dans les cas où elle chevauche les frontières des collectivités territoriales. Dans ce dernier cas il est nécessaire d'avoir des règles pour la répartition de revenus fiscaux parmi les collectivités territoriales sinon il risque d'y avoir double imposition ou zéro imposition. Il risque d'y avoir aussi des distorsions dans les procédures de révision pour les matières imposables se trouvant dans différents Etats.

Le besoin de ressources fiscales

Pour assurer la responsabilisation, les instruments fiscaux doivent être dans la mesure du possible, en liaison avec les besoins de revenus. Ainsi les instruments fiscaux qui sont utilisés pour la réalisation de certains objectifs de la politique gouvernementale doivent être affectés au niveau d'administration ayant la responsabilité de réaliser ces objectifs. Par conséquent, il serait approprié d'impartir les impôts progressifs de redistribution, les instruments de stabilisation, les impôts sur la location de ressources, etc. au niveau national tandis qu'il serait préférable d'affecter les péages sur les routes intercommunales, aux administrations d'Etat. Dans les pays avec une TVA au niveau fédéral, il serait trop onéreux d'avoir des impôts sur les ventes au niveau infranational. Dans de telles circonstances et étant donné le besoin de ressources des administrations infranationales, il serait logique de permettre à celles-ci de percevoir les impôts traditionnellement réservés aux niveaux nationaux.

Un compromis : Responsabiliser les administrations infranationales tout en préservant l'efficacité et en évitant les distorsions nationales

Le problème majeur avec les recommandations ci-dessus sur la répartition du pouvoir d'imposition (voir tableau ci-joint), c'est que les revenus dégagés pour les administrations des collectivités territoriales sont généralement insuffisants. C'est pour cette raison partiellement, que les administrations infranationales dans plusieurs pays, surtout celles du niveau intermédiaire, perçoivent une variété d'impôts spéciaux (impôts indirects) : impôts sur les jeux du hasard, sur les véhicules et ainsi de suite. Mais encore ces prélèvements rapportent rarement les montants nécessaires au financement d'une part importante des postes comme l'éducation et la santé qui sont pourtant souvent affectés aux administrations infranationales.

Résoudre le problème

La première solution consiste à apporter un supplément aux revenus locaux par des transferts de revenus fiscaux sans empêcher les collectivités à prélever leurs propres impôts (voir section sur les transferts).

La deuxième solution c'est de permettre aux administrations infranationales de collecter leurs propres impôts à supposer que ces impôts ne concernent que les résidents locaux. En principe un impôt sur les ventes au détail ou un impôt sur le revenu des personnes serait possible. Mais dans la pratique, le seul impôt général, efficace et souhaitable qui semble être réalisable pour les administrations infranationales est une surtaxe à taux uniforme (piggybacking, dans la langue courante). L'Impôt sur la vente au détail est souvent peu pratique dans les pays en développement ou en transition.

Ce qui semble être critique pour assurer la responsabilisation des pouvoirs locaux sans coûts d'efficacité ( qu'il s'agisse de surtaxes, de taxes locales sur la propriété, ou de toute taxe locale en général) c'est (1) de limiter autant que possible leur pouvoir d'imposition à leur collectivités et (2) de leur permettre d'établir leurs propres taux d'imposition. Pour l'efficacité il serait souhaitable d'établir l'assiette des impôts et même faire la collecte au niveau central mais pour assurer la responsabilisation il est critique que les pouvoirs locaux aient la responsabilité d'établir (peut-être dans une certaine mesure seulement) les taux d'imposition.

Les économies en transition : redéfinir les compétences locales

Il y a une situation spéciale dans quelques pays en transition (les Etats nouvellement indepents, la Chine, le Vietnam...) où les administrations locales ont traditionnellement un rôle important dans la détermination de l'assiette des impôts nationaux. Dans ces pays en transion, le gouvernement central peut ne pas avoir un contrôle absolu sur la matière imposable parce qu'elle est du ressort des pouvoirs locaux. Par exemple en Chine et en Russie, les impôts étaient recouvrés au niveau local (au moyen d'un système de sous-traitance, en Chine) et puis partagés avec les niveaux supérieurs. Ce système incitaient les pouvoirs locaux à faire un plus grand effort pour recouvrer les taxes qu'elles gardaient intégralement que pour celles dont le gros devait être remis aux niveaux supérieurs. Les administrations locales dans ces pays préféraient recevoir des transferts en nature et des contributions de leurs propres entreprises que de percevoir des impôts élevés sur les sociétés qu'elles devaient partager avec les niveaux supérieurs. Le partage de revenus fiscaux au cas par cas menaient à des niveaux très variés d'efficacité dans la gestion des impôts.

En plus, dans un pays où il y a des désaccords entre les différents niveaux d'administration, la gestion des impôts par une administration infranationale pour le compte du niveau national n'est pas conseillée puisque celle-ci peut bien refuser de remettre les taxes collectées en cas de mécontentement (le cas de Tatarastan en Russie, par exemple). La Chine a récemment renforcé la capacité de son fisc central afin de mieux collecter ses impôts nationaux et les impôts partagés. Aussi, le chevauchement de compétences et le manque de coordination dans la gestion des impôts surtout dans le cas des impôts sur les ventes et les accises peuvent engendrer des problèmes.

Conclusion : Une solution de compromis

La décentralisation peut potentiellement affaiblir la responsabilisation en brisant les liens entre les niveaux d'imposition et les niveaux de dépenses. On est en train de céder de larges pouvoirs en matière de dépenses aux administrations locales pour améliorer les prestations de services, mais il y a peu d'impôts assurant des rentrées importantes qui peuvent être affectés aux administrations locales sans provoquer des déséquilibres économiques au niveau national. Pour aboutir à une fiscalité efficace il serait préférable que les administrations locales perçoivent l'impôt sur les facteurs immobiles (par exemple, l'impôt sur la propriété). Pour satisfaire leurs besoins en ressources elles devraient percevoir des redevances tels que péages, impôts personnels, impôts fonciers pour recouvrer leurs frais. Ces revenus fiscaux seront probablement peu suffisants dans beaucoup de collectivités et par conséquent des transferts interadministrations seraient nécessaires pour réduire ces déséquilibres. Si des impôts plus élevés peuvent augmenter la pression des administrés pour une meilleure performance des pouvoirs locaux, les subventions centrales, elles, peuvent être conçues de telle façon à atteindre le même objectif.